Pendant les 13 années de guerre civile en Syrie, les chrétiens sont restés largement fidèles au gouvernement d’Assad qui se présentait comme un défenseur des minorités religieuses, mais la prise rapide du pouvoir par le groupe Tahrir al-Sham a suscité des inquiétudes au sein de la minorité chrétienne du pays.
Les chrétiens syriens qui étaient fidèles au gouvernement Assad peuvent-ils faire confiance aux promesses des nouveaux dirigeants de ce pays ?
Selon un rapport d’une organisation religieuse non gouvernementale basée aux États-Unis, le nombre de chrétiens en Syrie avant la guerre civile en 2011, atteignait 1,5 million, soit environ 10 % de la population syrienne. Mais en une décennie, leur nombre a considérablement diminué et en 2022, il ne restait plus que 300 000 chrétiens, soit environ 2 % de la population. Les chrétiens plus riches et plus instruits que la population syrienne moyenne, ont émigré en masse pour échapper au groupe terroriste ISIS et à la détérioration de la situation économique de la Syrie.
Les nouveaux dirigeants de Tahrir al-Sham ont assuré à plusieurs reprises, au peuple syrien et à la communauté internationale, qu'ils protégeraient toutes les minorités, notamment les chiites, les alaouites, les druzes, les kurdes et autres, et le nouveau Premier ministre syrien, Muhammad al-Bashir, a appelé les réfugiés à l'étranger, à rentrer dans leur pays, promettant de garantir les droits de toutes les religions en Syrie.
L'organisation non gouvernementale « Christian Defence », basée à Washington, a récemment exprimé son inquiétude quant au sort des chrétiens en Syrie. Certaines sources à Alep, après la chute de Bachar al-Assad et le contrôle de la ville par Tahrir al-Sham, ont annoncé que les chrétiens vivaient dans la peur et étaient la cible de crimes et d’attaques.
Cependant, le « Center for Peace Communications », une organisation à but non lucratif basée à New York, a récemment interviewé des chrétiens d'Alep à l'occasion de la fête de Sainte Barbe, célébrée par les chrétiens du Moyen-Orient. Ils ont déclaré qu'au début de l'occupation de la Syrie par Tahrir al-Sham, ils ressentaient de la peur et de l'inquiétude, mais qu'ils estiment désormais, qu'il n'y a aucune raison de s'inquiéter et que les églises poursuivent leurs activités normalement.
Hazem al-Ghobara, analyste syrien et ancien conseiller principal du Département d'État américain, a déclaré au Times of Israël : « Aujourd'hui, après le renversement de Bachar al-Assad, qualifier les chrétiens de partisans du régime d'al-Assad serait une insulte à leur égard. Amon avis, dès que Tahrir al-Sham sera reconnu comme gouvernement international en Syrie, il sera contraint de faire des concessions au peuple syrien, et de manifester davantage d’ouverture ».
Les chrétiens comme de nombreux Syriens, se sont réjouis de la chute de Bachar al-Assad. Behjat Qarakesh, prêtre de l'église d'Alep, a déclaré à Vatican News : « Ces dernières années, les rebelles ont fait preuve de beaucoup de tolérance envers les chrétiens et ont restitué leurs biens confisqués. Dans la région d’Idlib, sous le contrôle de Tahrir al-Sham, les chrétiens ont été autorisés à poursuivre leurs pratiques religieuses ».
Mgr Hana Jalouf, évêque successeur d'Alep, a déclaré à l'agence de presse du Vatican qu'il avait rencontré le leader de Tahrir al-Sham, Ahmad al-Shara, qui avait assuré que les chrétiens et leurs propriétés ne seraient pas touchés, et que toutes leurs demandes seraient satisfaites.
Ahmed al-Shara, connu sous le nom d'Abou Mohammad al-Jolani, a déclaré dans une interview à Al-Jazeera, que dès que le groupe Tahrir al-Sham prendra le contrôle de la Syrie, il imposera les lois islamiques au pays, et que les chrétiens auront le statut spécial de « gens du Livre », et seront autorisés à pratiquer leur religion, mais selon les règles de l'Islam, ils seront tenus de payer des impôts et la jizya.
Aujourd’hui, il semble qu’Al-Jolani ait renoncé à ses positions fondamentalistes. En 2016, il a renoncé à ses liens avec Al-Qaïda et se présente désormais comme un partisan du pluralisme et de la tolérance.
Le gouvernement de transition syrien est composé uniquement de membres de Tahrir al-Sham et ne comprend aucun représentant de factions laïques ou religieuses autres que les musulmans sunnites.
L'expérience de Tahrir al-Sham dans l'administration de la région d'Idlib, au cours des dernières années, peut être un signe de leur comportement futur dans l'administration du pays.
Le correspondant de France 24, Wasim Nasr, qui s'est rendu à Idlib en 2023, a rapporté que des centaines de minorités chrétiennes restées dans la région, étaient autorisées à organiser des cérémonies religieuses, mais qu'elles ne pouvaient pas montrer leurs croix ni faire sonner les cloches des églises.