Muezzin de père en fils à al-Aqsa

10:40 - February 10, 2016
Code de l'info: 3459048
Depuis plus de cinq cents ans, les Kazaz se transmettent de père en fils l'art d'un chant envoûtant, celui de l'appel à la prière.
Muezzin de père en fils à al-Aqsa
Une nuit de mars 1229, on n'entendit pas les muezzins appeler à la prière à Jérusalem. Au nom du sultan al-Kamil, le cadi de Naplouse ordonna qu'ils se taisent pour ne pas importuner le sommeil de l'empereur Frédéric II de Hohenstaufen désormais maître de la ville. Au matin, ce dernier s'en étonna et déclara: «Tu as eu tort. J'avais surtout envie, en passant la nuit à Jérusalem, d'entendre les muezzins et leurs appels à louer Dieu pendant la nuit.»
Tout le monde ne fait pas une expérience «romantique» de la prière nocturne du muezzin, mais incontestablement les appels à la prière qui retentissent en ville font partie de son charme. A Jérusalem, parmi les voix qui s'élèvent des minarets, il y a celle de Firas. Elle retentit toujours quelques secondes avant les autres, car Firas est le muezzin d'al-Aqsa.
Allahou akbar, Dieu est le plus grand. Dieu est grand en effet qui a donné à Firas la voix de ses ancêtres, celle qui leur mérite d'être depuis plus de cinq cents ans les muezzins du troisième lieu saint de l'islam. D'après sa mère, la voix de Firas est encore plus belle que celle de son père. Et c'est vrai qu'elle est belle au point que Firas fasse de chaque prière un chant envoûtant. Il faut dire que l'ingénieur du son a ajouté juste ce qu'il faut d'écho à son souffle long et à sa technique épurée.
«Je suis muezzin à plein-temps. Je ne vais chanter nulle part ailleurs. Je suis comme consacré à cette mosquée.»
De Firas, sa mère dit qu'il lui causait du souci quand il était enfant. «A l'âge de cinq ans, il s'enfuyait de l'école pouraller écouter son père chanter à la mosquée.»Cette vocation précoce lui fit lancer son premier adhan, l'appel à la prière, à l'âge de douze ans. Il en a aujourd'hui vingt-huit. «Je suis muezzin à plein-temps.
C'est mon rêve, mon but depuis que je suis enfant. Je n'ai jamais songé à faire autre chose. Je n'ai aucune autre activité et ne vais chanter nulle part ailleurs. Je suis comme consacré à cette mosquée.» Parfois néanmoins, Firas se rend à l'étranger pour faire entendre comment l'on chante à al-Aqsa. «Les Kazaz sont célèbres à Jérusalem et dans le monde musulman», explique-t-il dans un sourire.
Les cinq appels à faire retentir par jour, il les partage: «Mon père et moi, nous assurons chacun deux appels à la prière. Un autre s'occupe de celui de l'aurore.» Firas explique que son rôle est différent de celui de l'imam. Ce dernier doit savoir prêcher et conseiller les fidèles. «Il doit avoir étudié le fiqh, qui est la jurisprudence islamique, ou les hadiths, qui sont les traditions attachées aux actes et aux paroles du Prophète. Le muezzin, lui, peut ne pas avoir étudié. Cependant, si autrefois je ne faisais que l'appel à la prière, maintenant j'étudie pour apprendre à psalmodier le Coran.»
Les techniques nécessaires se transmettent oralement. Et le chant connaît de nombreuses variantes puisque aucune mélodie n'est codifiée. «Tout est question d'expérience.»
En plus de la voix, Firas a hérité de son père une large stature, les traits du visage et le port altier. Comme ses ancêtres dont les photos ornent le mur de la maison familiale. Firas vit bien le poids de cette tradition: «Je sais que les gens aiment m'entendre chanter, dit-il avec simplicité. Pour être muezzin, il faut savoir bien chanter, mais pour être muezzin à al-Aqsa, il faut appartenir à la famille Kazaz.» Toute la fierté de Firas est là. «C'est mon fils qui prendra la suite», ajoute-t-il. Précisant, soumis malgré tout à sa volonté: «Inch'Allah, si Dieu veut!»
Pour écouter un appel à la prière chanté par Firas Kazaz, cliquez ici.


Adzan di Masjid AlAqsa

lefigaro

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