Selon « Refinitiv », le marché de la Fintech islamique devrait atteindre 4,9 billions de dollars d'ici trois ans. Un rapport de « l'Islamic Global Connect Forum » en 2022, publié en mai 2022 par la Banque de Malaisie « Maybank », a déclaré que 89% des répondants estiment que la Fintech a accéléré la numérisation des services financiers islamiques et pensent également, que la Fintech les a rendus plus accessibles à l'échelle mondiale, et a amélioré l'expérience des clients dans l'utilisation de leurs services.
Zaakira Allana, directrice du règlement des différends basés à Birmingham chez « Fieldfisher International Law Firm », a déclaré : « L'expansion de la Fintech varie en fonction de ses sous-branches, mais elle vise à la faire évoluer vers un marché plus large et plus inclusif pour les consommateurs islamiques. L'Arabie saoudite, l'Iran, les Émirats arabes unis, la Malaisie et l'Indonésie sont les principaux pays en termes de volume d'échanges sur les technologies financières islamiques parmi les pays membres de l'OCI. Le rapport mondial de 2021 sur les technologies financières préparé par « Standard Dinar » et une société financière structurée basée à Londres, estime qu'il y a 241 Fintech islamiques dans les pays de l'OCI et non membres de l'OCI, et que la valeur marchande dans les pays membres de l'OCI, est de 49 milliards de dollars.
Marina Kahiani, experte au cabinet d'avocats international « GRATA » basé à Almaty au Kazakhstan, estime que les pays d'Asie centrale à forte population musulmane, comme le Kazakhstan, où environ 70% de la population est musulmane, sont parmi les pays ayant le plus grand potentiel de services Fintech. « Les entreprises kazakhes tentent de développer des technologies conformes à la charia. Cependant, ils ne font que commencer. En 2019, le Kazakhstan a dévoilé un plan global de financement islamique 2020-2025 pour soutenir l'innovation de l'industrie. Le centre est coordonné par le Centre financier international d'Astana (AIFC) basé à Nursultan. Le Centre financier international d'Astana (AIFC) a été créé en 2018 pour stimuler la croissance des sociétés de services financiers du Kazakhstan. Son système juridique est basé sur les principes du droit britannique, plutôt que sur les lois du Kazakhstan. Il s'agit d'une étape importante car elle comporte moins de restrictions et une application internationale plus large des règles commerciales. La première carte islamique numérique a été récemment lancée par « Tayyab Islamic Finetek » en coopération avec la « RBK Bank » du Kazakhstan et « Visa » via « Dubai FinTech Ventures ». La carte délivrée aux utilisateurs lors du téléchargement de l'application mobile Tayeb, est entièrement conforme à la loi islamique et permet aux utilisateurs d'utiliser Apple Pay et Samsung Pay, d’effectuer des paiements sans contact et des virements instantanés. Des cartes peuvent être délivrées aux utilisateurs sur demande. La carte permet également aux clients d'économiser des fonds dans quatre devises (tangué du Kazakhstan, dollar, rouble et euro) et de recevoir de l'argent à partir de n'importe quel guichet automatique dans le monde. Pour empêcher son utilisation pour des activités illicites telles que les casinos et magasins de jeux d'argent, d'alcool et de tabac, les bars et les discothèques, des restrictions ont été intégrées dans l’application, qui détectent ces transactions », a-t-elle dit.
Les pays africains à forte population musulmane, accueillent également la Fintech conforme à la charia. Le rapport mondial islamique sur les Fintech pour 2021 faisait référence à l'Afrique subsaharienne, au Moyen-Orient et à l'Afrique du Nord (à l'exclusion des pays du Golfe Persique), dans neuf domaines des services financiers sociaux des Fintech comme l’assurance, la gestion de patrimoine, les dépôts et prêts, et la levée de capitaux. En juillet 2021, le Nigeria a lancé l'eTijar, une plate-forme Fintech conforme à la loi islamique, qui fournit des services d'investissement et d'épargne islamiques aux musulmans et aux non-musulmans. Selon Bashir Yousef, fondateur et PDG d'eTijar, lorsque son équipe a commencé à travailler sur la plateforme en 2018, ils ont identifié d’énormes lacunes sur le marché financier du pays.
« Beaucoup de jeunes musulmans avec de bons revenus, n'épargnent ou n'investissent pas. Nous avons dû construire une infrastructure basée sur la technologie, pour offrir à une population plus jeune des moyens accessibles d'épargner et d'investir son argent. Ce problème est plus aigu dans les zones rurales où la plupart des gens sont exclus des systèmes financiers en raison du manque de connaissances et d'installations », a-t-il expliqué.
crypto-monnaies
Lingxi Wang, directeur général adjoint du cabinet d'avocats « Foot Anstey » au Royaume-Uni, a déclaré lors d'une table ronde sur la finance islamique, organisée par la société en 2021 : « Les propriétaires de Fintech islamiques ont également constaté que lorsqu'ils étaient référés à un expert de la FCA (British Financial Conduct Authority), ces experts n'avaient pas les connaissances et la compréhension suffisante du financement islamique pour fournir des solutions efficaces immédiates. Alors que la FCA s'adapte au financement islamique par le biais des régimes réglementaires actuels, la création d'un produit personnalisé au Royaume-Uni nécessite un long processus de consultation juridique. La Grande-Bretagne devrait tirer des leçons de la Malaisie dans son approche de la surveillance réglementaire de la Fintech islamique. En août 2020, la Commission malaisienne des valeurs mobilières a annoncé un accord de coopération avec l'Autorité indonésienne des services financiers (Otoritas Jasa Keuangan) (OJK) pour partager ses connaissances sur les technologies financières et les évolutions réglementaires. En outre, certains aspects de la nouvelle Fintech islamique peuvent rencontrer des problèmes, en particulier dans les juridictions non islamiques. Par exemple, les nouvelles banques et services conformes à la charia, peuvent ne pas disposer de licences bancaires complètes et nécessiter des services et des fonds de banques conventionnelles, créant ainsi une zone grise pour les obligations réglementaires et de conformité », a-t-il dit.
Un autre sujet de confusion est l'état des monnaies numériques et leur conformité à la loi islamique, qui est une bouée de sauvetage pour certaines Fintechs. En mai 2022, la Banque centrale du Qatar a publié une déclaration mettant en garde ses sociétés de services financiers contre le fait de traiter avec des institutions financières ou des fournisseurs de services non autorisés, le Qatar ne fournissant actuellement aucun service d'actifs virtuels (VASPS). Dans un discours prononcé en 2019, Fahd Yatim, directeur de la supervision des institutions financières islamiques à la Banque centrale de Bahreïn, a expliqué que la technologie réglementaire dans le financement islamique, visait essentiellement à accroître la transparence, la cohérence et la normalisation des processus réglementaires.
Parmi les exemples de développeurs de technologies de surveillance conformes à la charia figurent les systèmes financiers anglo-jordaniens ICS (ICSFS), qui fournissent des logiciels financiers et bancaires islamiques.
Selon Maybank, 34 % des personnes interrogées pensent que l'impact de la technologie de surveillance sur la croissance, augmentera considérablement au cours des trois prochaines années, tandis que 47 % prévoient que cet impact n’augmentera que légèrement.
Si la Fintech islamique et la technologie de surveillance sont combinées, cette partie importante de la finance islamique pourrait devenir plus forte que prévu.