Bien que la plupart des orientalistes venus dans les pays islamiques, soient venus pour une mission spéciale de leur gouvernement, cela ne les a pas empêchés d'observer et d'enregistrement avec exactitude, les détails sur les zones visitées et les caractéristiques des sociétés musulmanes.
Pedro Teixeira, orientaliste portugais, est l'un des plus anciens de ces voyageurs qui a visité les zones sous contrôle de l'Empire portugais, à cette époque, en particulier la région du Golfe Persique et les pays environnants. Son voyage s'est poursuivi de l'île de Goa en Inde jusqu'en Italie, en Irak actuel en passant par le Golfe Persique, Bassora, Najaf Ashraf et Karbala, Alep et Chypre.
Après son arrivée à Bassora, il se rendit à Najaf Ashraf, l'Irak était alors sous occupation ottomane en 1604, et le dirigeant qu'ils nommèrent à Karbala et à Najaf, était Amir Jasham Nasir al-Mahna, qui se faisait appeler roi, percevait de lourds impôts et tributs auprès des habitants de ces deux villes.
Teixeira a écrit qu'il avait été témoin du chaos total qui existait à Karbala et en Irak, à cause de la guerre entre l’Iran et les Ottomans.
Teixeira est arrivée à Karbala, le 24 septembre 1604, et a séjourné dans l'une des tentes préparées pour les pèlerins par des bienfaiteurs.
Selon lui, les habitants de cette ville sont 4000 familles, issues de différents groupes ethniques, arabes, iraniens et turcs. Les Turcs étaient stationnés autour de Karbala et étaient responsables du contrôle et de la surveillance autour de la ville, mais à cause de la guerre avec les Iraniens, ils s'étaient retirés vers Bagdad, et les Iraniens avaient également quitté Karbala, à cause de la guerre et de l’insécurité qui régnait.
Dans son récit de voyage, Pedro Teixeira écrit : « les marchés de Karbala étaient construits en briques et regorgeaient de produits de première nécessité et de biens commerciaux, les gens des villes et villages voisins venaient sur ces marchés pour faire du commerce, les prix étaient bas et le blé, le riz, l'avoine, les fruits, les légumes et la viande étaient disponibles en abondance.
Il fait aussi référence au grand nombre de pèlerins venus du monde entier à Karbala, et aux serviteurs qui les accueillent en leur offrant de l’eau de puits voisins, très claire, dans des outres en cuir et des belles coupes en cuivre.
Teixeira mentionne également que la température à Karbala, est très agréable et qu'il y fait meilleur que dans n'importe quelle autre ville qu'il a visitée en Irak. Il mentionne également qu'il existe un certain nombre de puits à Karbala par lesquels l'eau est fournie au public, et de nombreux arbres dans les parcs et jardins, autour de la ville, avec les mêmes fruits qu’en Europe.
Selon cet orientaliste portugais, l'irrigation de ces jardins se fait par une rivière qui dérive de l'Euphrate, un grand nombre de vaches et de moutons paissent dans les pâturages autour de la ville, et il y a deux grands étangs carrés à l'extrémité de la ville, construits pour le divertissement et les voyageurs.
Teixeira évoque également la sécurité de la ville. Selon lui, la seule chose qui perturbe la paix de cette ville est la présence de l'armée ottomane, de ses partisans et de quelques Bédouins, responsables d'émeutes et de chaos, qui tentent de semer la terreur parmi les habitants.
La description de Teixeira de la détérioration de la situation sécuritaire à Karbala, à cette époque, et du contrôle de Nasser al-Mohaneh et de son groupe sur celle-ci, est la même que celle de l'orientaliste britannique, Stephen Hemsley Longrigg qui estime que ces forces ont causé beaucoup de problèmes aux pèlerins, les ont pillés et leur ont demandé des tributs.