Selon Al Jazeera, ce pillage, qui vise à effacer l’identité culturelle musulmane, s’est intensifié depuis 1948, notamment à travers l’appropriation d’archives et de biens historiques palestiniens.
La colère a explosé récemment sur les réseaux sociaux au Maroc après que la Bibliothèque nationale israélienne a publié la photo d’un Coran marocain vieux de dix siècles. Cette image, relayée par le directeur des archives marocaines, a provoqué l’indignation, renforcée par la crainte qu’il s’agisse du manuscrit écrit à l’or par le sultan Abou al-Hassan et offert au fils de Saladin.
Des chercheurs comme Abdessamad Belkebir dénoncent une stratégie sioniste visant à déposséder les peuples musulmans de leur patrimoine. Pour lui, le mouvement sioniste tente de légitimer sa domination sur la Palestine, même par des moyens culturels.
Le président de l’Observatoire marocain contre la normalisation appelle à une action juridique internationale. Belkebir estime que le Maroc doit tout mettre en œuvre pour récupérer ces trésors, y compris par voie d’achat, et que le droit international peut soutenir une telle démarche.
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La communauté marocaine et la perte de son patrimoine après la guerre des Six Jours
Ahmed Wehhamane, professeur de sociologie, explique que les Marocains établis depuis des siècles à Jérusalem n’ont pas été épargnés par les conséquences de la guerre des Six Jours de 1967. En plus des pertes humaines et des déplacements forcés, ils ont vu leur quartier rasé par l’armée israélienne. D’importants documents historiques, en arabe et en amazighe, ont été pillés. Le quartier a ensuite été transformé en lieu de rites pour un prétendu temple juif.
Ridwane Amr, directeur du Centre des manuscrits et du patrimoine islamique de la mosquée Al-Aqsa, souligne l’ampleur du choc face aux archives aujourd’hui détenues par Israël. Il s’interroge sur la manière dont des manuscrits islamiques rares, sans équivalent dans le monde musulman, se retrouvent sous contrôle israélien.
Il explique que, depuis 1948 et 1967, les forces israéliennes ont méthodiquement volé manuscrits et archives dans les maisons, mosquées et bibliothèques de Palestine, en coopération avec des collectionneurs. Ces trésors sont désormais exposés à la Bibliothèque nationale israélienne.
Amr précise qu’il ne s’agit pas seulement du Coran, mais aussi d’ouvrages comme La Genèse du Monde, attribué à Ibn Taymiyya, et dont aucun autre exemplaire n’est connu à ce jour.
Le combat pour récupérer les manuscrits islamiques volés
Une importante collection de manuscrits connue sous le nom de « collection Yehuda » a été constituée au début du XXe siècle, avant la création de l’État israélien. Son nom vient d’un collectionneur juif passionné par la civilisation arabo-islamique. Il a acquis ces manuscrits à bas prix dans des villes comme Damas, Jérusalem et en Palestine, avant que sa collection ne soit transférée, en partie, dans des bibliothèques israéliennes.
Ridwane Amr, directeur du Centre des manuscrits d’Al-Aqsa, souligne que seule une petite portion de ces trésors est exposée. Il estime qu’au moins 40 000 manuscrits arabes et islamiques sont aujourd’hui conservés dans les archives israéliennes.
Il décrit cette situation comme une catastrophe culturelle comparable à la perte de la terre et de la population palestiniennes. À Jérusalem, environ 8 000 manuscrits subsistent dans plusieurs bibliothèques, dont la plus importante est celle de la mosquée Al-Aqsa, qui en conserve 4 000.
Amr conclut en affirmant que son équipe travaille activement pour localiser, répertorier et restaurer les manuscrits légués à Al-Aqsa. Ils collaborent avec les familles de Jérusalem pour restituer ces œuvres au patrimoine islamique et les préserver au centre de restauration de la mosquée.