Réalisé par Kaouther Ben Hania, le long-métrage raconte l’histoire véridique de Hind, une fillette palestinienne de cinq ans, piégée dans une voiture prise pour cible par l’armée israélienne à Gaza, et dont la voix a bouleversé le monde.
Lors de la conférence de presse organisée à Venise, Ben Hania et son équipe ont été longuement applaudies par les journalistes présents. La réalisatrice a expliqué que ce film, au-delà de son aspect artistique, avait pour objectif de rendre justice à des victimes trop souvent « déshumanisées » dans les médias occidentaux.
Le film reconstitue les derniers instants de Hind grâce aux enregistrements téléphoniques réels passés avec des volontaires du Croissant-Rouge palestinien, qui tentaient de la maintenir en ligne jusqu’à l’arrivée d’une ambulance. Cette dernière, pourtant autorisée par l’armée israélienne, a été elle-même prise pour cible, causant la mort de la fillette et des secouristes. L’horreur de cet épisode, relayée sur les réseaux sociaux, a suscité une vague d’indignation internationale et renforcé l’écho de l’œuvre de Ben Hania.
L’actrice Saja Kilani a ouvert la rencontre avec un message fort : « Hind n’est pas une exception, mais l’une des dizaines de milliers d’enfants tués ces deux dernières années par le régime sioniste. Derrière chaque chiffre, il y a une histoire qui n’a jamais été racontée. » Elle a insisté sur la nécessité de redonner dignité et voix à ces vies brisées.
La distribution, entièrement palestinienne, inclut Moutaz Malhis, Clara Khoury et Amer Hlehel. Malhis, né à Jénine, incarne un volontaire du Croissant-Rouge. Il a confié avoir été saisi d’attaques de panique lors du tournage, tant la proximité avec son propre vécu d’enfant sous les bombardements était douloureuse. Clara Khoury, pour sa part, a décrit des scènes de tournage où l’équipe entière était en larmes, emportée par l’intensité de ce récit encore brûlant d’actualité.
Le projet a gagné une dimension supplémentaire grâce au soutien inattendu de grandes figures hollywoodiennes. Brad Pitt, Joaquin Phoenix et Rooney Mara figurent parmi les producteurs, et Phoenix comme Mara ont assisté à la conférence de presse pour réaffirmer publiquement leur engagement. Pour Ben Hania, leur participation est un signe fort que « Netanyahou perd la guerre culturelle à Hollywood », face à une mobilisation artistique croissante dénonçant le massacre des civils à Gaza.
La réalisatrice, déjà nommée aux Oscars pour Les Quatre Filles (2024) et L’Homme qui a vendu sa peau (2021), a souligné que sa démarche n’était pas seulement esthétique, mais profondément politique et humaine : « Le cinéma est une arme de vérité. Ce film est ma manière de dire : assez. »
Depuis sa projection, La Voix de Hind Rajab est considéré comme un favori pour le Lion d’Or. Le film poursuivra son parcours au Festival de Toronto, puis représentera officiellement la Tunisie dans la catégorie du meilleur film international aux Oscars 2025.
Au-delà du cinéma, l’histoire de Hind est devenue un symbole dans les mobilisations étudiantes et militantes. À Columbia University, des bâtiments occupés ont été renommés en sa mémoire. Dans de nombreux rassemblements, sa voix enregistrée circule comme un cri contre le silence imposé par l’occupation.
En conclusion, La Voix de Hind Rajab dépasse le cadre d’un simple film. C’est une œuvre de mémoire et de résistance, qui met à nu la réalité de Gaza et interpelle la conscience mondiale. En plaçant le regard sur une enfant de cinq ans arrachée à la vie, Ben Hania redonne chair et voix à toutes les victimes anonymes d’un conflit marqué par la déshumanisation.