Abbas Khamehyar, conseiller culturel de l'Iran au Liban, dans une note à l'occasion du 13 Rajab et de l'anniversaire de la naissance de l'Imam Ali (AS), a écrit : « J'ai profité du 13 Rajab pour écrire un article sur l'un des admirateurs de l’Imam Ali (as), Georges Jordac, le grand écrivain chrétien libanais, créateur d’une œuvre en 6 volumes intitulée « L’Imam Ali, la voix de la justice humaine ». J'ai republié cette note une ou deux fois, les années suivantes. Le texte a été récemment publié en arabe, par le journal libanais Al-Akhbar, à l'occasion du septième anniversaire de la mort de Maître Jardad, bien qu'il s'agisse malheureusement du seul article publié à cette occasion.
A la veille du mois de Rajab de cette année et à l'occasion de l'anniversaire béni de la naissance de l’Imam Ali (as), je cherchais un sujet pour écrire une autre note quand une dame m’a appelé, s'est présentée comme la femme de Jardac, et a dit qu’elle voulait me rencontrer. J'ai dit avec joie, que j'étais prêt à la rencontrer. A l'heure prévue, une dame âgée, courbée et appuyée sur son déambulateur, est venue à mon bureau. Madame Yola, en l'honneur du lieu et de l'hôte, avait mis un foulard sur sa tête, et a dit : « Vous savez que la maison de Georges n'était pas sa propriété et qu'elle était louée ! Nous n'avons jamais été en retard dans le paiement du loyer, mais le propriétaire insiste pour que je quitte la maison. Dans cette maison, Georges a laissé une bibliothèque avec environ 5 000 livres et 900 magazines. La mémoire de l'homme qui a présenté l'Imam Ali (as) doit être gardée vivante. C'est un patrimoine humain précieux qui appartient à tous ».
Je confirme son propos et rappelle que l'une des préoccupations de Jardac de son vivant, était sa bibliothèque, et qu’à chaque rencontre je sentais qu’il était inquiet pour ses livres.
Elle a poursuivi : « Pendant l'écriture du livre, quelque chose s'est passé que je n'oublierai jamais. Un jour, en entrant dans son bureau, j'ai vu qu'il avait les larmes aux yeux. J'ai demandé : « Qu'est-il arrivé Georges ? » « Il n'a rien dit mais m'a montré ce qu'il avait écrit Le sujet du texte était le martyre de l'Imam Ali (as) lorsque l'Imam a décidé d'aller à la mosquée de Koufa pour les prières de la nuit du 19ème jour du Ramadan. Les oies et les canards le suivaient et empêchaient l'Imam de partir. L'Imam a dit : « laissez-les, c’est une cérémonie de deuil ». Georges s'est mis à pleurer. J'ai pleuré aussi. Georges était un écrivain brillant. Les amis de Georges qui étaient de différentes religions, venaient régulièrement chez nous pour lui parler. Il répondait à leurs questions. Georges avait une pensée et une perspicacité profondes. Malheureusement, la valeur de la lecture a diminué. Il y a des chanteuses qui gagnent des dizaines de milliers de dollars en organisant un concert en une seule nuit, mais la lecture de livres est complètement négligée ! Je me souviens qu'une de ses élèves, une jeune fille, pleurait beaucoup à ses funérailles. On lui a demandé : « Qu'est-ce que Georges Jordac signifie pour vous ? » Elle a dit : « Georges était une école, une encyclopédie et plus encore ». Je le ressens à chaque instant. Je sens qu'un grand être humain a disparu qui devait être à mes côtés. Ce qui me réconforte maintenant, ce sont ses livres, ses cassettes et ses manuscrits ».
Abbas Khamehyar et Georges Jordac
Un de mes collègues, le Dr Ali Qusayr, qui était assis à côté de moi, a déclaré que Georges avait toujours été très critique sur cette question dans son émission de radio, et critiquaient les politiciens qui sont prêts à payer une fortune pour des chanteuses, mais ne dépensent rien pour le développement culturel.
Il a dit : « J'ai récemment lu un article de presse qui écrivait que le ministère de la Culture avait l'intention d'organiser une cérémonie commémorative pour Georges Jordac, le 22 mars 2022. Son fils, le Dr Hadi, souhaite qu'une statue soit installée et prévoit de lancer un site Internet pour publier l'œuvre de son père. Nous avons beaucoup d'écrits de lui qui n'ont pas encore été publiés. Si je survis, je publierai un recueil de ses poèmes qui n'ont pas été publiés. Sa bibliothèque et sa maison doivent être conservées ! Il a pris de belles photos de ses deux voyages en Iran, qui sont dans sa bibliothèque. Grâce à ces photos, j'ai réalisé que l'Iran est un beau pays. Il me parlait toujours de son peuple et disait que les gens en Iran, sont très bons, amicaux et cultivés. Il souhaitait retourner en Iran et y rester ».
Une semaine plus tard, nous sommes allés à la maison de cet écrivain et poète chrétien dans le quartier chrétien de Beyrouth, pour trouver une solution à la situation de la bibliothèque et de la maison de Georges Jordac. Il n’y avait pas de place pour s'asseoir et la maison ressemblait à une librairie comme avant. Des livres, des cassettes et des notes de Georges étaient partout dans la maison, même sur les lits, les canapés, les tables et les chaises... partout ! J’ai récité une prière pour ce véritable amoureux de l'Imam Ali (AS), et j’ai pris des photos de chaque coin de la maison pour documenter mes notes.
Les inquiétudes de Yola concernant la préservation du patrimoine intellectuel et littéraire de Georges Jordac, ainsi que sa bibliothèque, qui est malheureusement en train d'être détruite en raison des mauvaises conditions de stockage, sont fondées et doivent faire l'objet d'une attention particulière et immédiate.
Le nom et la mémoire de ce grand écrivain, fasciné par Ali (AS), doivent rester éternels mais comment et de quelle manière ? Je ne sais pas !