Des campagnes de désinformation lancées contre les musulmans indiens

8:26 - May 03, 2023
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Téhéran(IQNA)-Désormais, l’Inde est plus peuplée que la Chine, selon l’ONU. Les hindous craignent d’être supplantés par les musulmans et mènent de nombreuses campagnes de désinformation.

Depuis que les Nations unies ont annoncé que la population de l’Inde avait dépassé en nombre celle de la Chine, des influenceurs hindous se déchaînent contre les musulmans, qu’ils accusent de faire trop de bébés afin de les supplanter, au risque d’alimenter une islamophobie déjà galopante.

Amit Upadhyay, pharmacien de métier, anime à ses heures perdues une page Facebook très populaire, sur laquelle il diffuse de fausses données démographiques. À l’annonce des Nations unies, le mois dernier, le pharmacien et ses 40’000 abonnés ont ressenti le besoin d’action. «Je dis à tous mes clients hindous de faire plus d’enfants pour contrer les musulmans», explique-t-il. «Sinon, ils deviendront une menace et finiront par éliminer la religion hindoue de l’Inde.»

Le pays compte 1,4 milliard d’habitants, dont environ 210 millions de musulmans, mais le taux de natalité a baissé de manière générale ces dernières décennies, à l’instar des tendances mondiales. La dernière enquête nationale sur la santé des familles, réalisée en 2021, a révélé un taux de fécondité de deux enfants par Indienne, et de 2,3 pour les musulmanes.

Les musulmans resteront une minorité

Selon les prévisions du centre de réflexion Pew Research Center, la population musulmane indienne devrait atteindre 311 millions de personnes d’ici à 2050, contre 1,3 milliard pour les hindous. Malgré leur progression, les musulmans resteront donc une minorité dans le pays de 1,7 milliard d’habitants au milieu du siècle, selon les projections du groupe de réflexion américain.

Les idéologues nationalistes hindous disséminent, depuis des années, des théories du complot, selon lesquelles les musulmans œuvrent à supplanter la suprématie numérique hindoue. Elles ont parfois été reprises par le Bharatiya Janata Party (BJP), parti nationaliste hindou du Premier ministre, Narendra Modi. En 2019, Rakesh Sinha, membre du BJP, a présenté au Parlement un projet de loi sur le contrôle de la population, qui proposait de limiter le nombre d’enfants par ménage indien à deux.

«Les hindous se marient une fois et ont deux enfants. Les musulmans se marient quatre fois et ont tellement d’enfants qu’ils peuvent avoir leur propre équipe de cricket » a écrit, Ishwar Lal, membre d’un groupe nationaliste hindou affilié au parti du Premier ministre Modi.

Toutefois, ce projet de loi, qui a suscité un tollé, a été retiré après un discours de Rakesh Sinha sur la disparité soi-disant flagrante entre les taux de natalité hindous et musulmans. «Les hindous se marient une fois et ont deux enfants, alors que les musulmans se marient quatre fois et ont tellement d’enfants qu’ils peuvent avoir leur propre équipe de cricket», affirmait récemment Ishwar Lal, membre d’un groupe nationaliste hindou affilié au BJP, dans une allocution publique.

Trois enfants: un pour la nation, un pour le foyer, un pour la religion

À la même période, à Haridwar, un lieu de pèlerinage hindou sur les contreforts de l’Himalaya, le prêtre Ravindra Puri exhortait une foule de fidèles hindous à mener une contre-offensive démographique. «De deux enfants, les hindous sont passés à un enfant, cela provoque un déséquilibre au sein de la population», déplorait-il, avant de préconiser d’en faire trois. «Un pour servir la nation, un pour s’occuper du foyer et un pour servir la religion en devenant prêtre.»

«Un outil de propagande important»

L’ancien chef des élections indiennes, S.Y. Quraishi, lui-même musulman, a beaucoup écrit sur la propagation de fausses informations concernant le taux de natalité des musulmans. Il souligne qu’il s’agit d’un outil de «propagande» important pour les nationalistes hindous. «Ils incitent les hindous à faire plus d’enfants, en créant la peur que les musulmans ne les supplantent en nombre», dit-il. «Cela n’arrivera jamais.»

AFP

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